03.10.11

Franz Wiget: «Cuisinier de l’année» du guide GaultMillau 2012

Zurich: Le plus convoité des prix de la scène culinaire suisse est attribué pour la première fois à un cuisinier de Suisse centrale: Franz Wiget, 50 ans, 18 points au GaultMillau. Il obtient dans son établissement Adelboden, le titre de «Cuisinier de l'année» pour 2012. A l'étage supérieur, le cénacle se rétrécit: il n'y a plus que six chefs qui obtiennent la note 19 et l'un d'entre eux a déjà annoncé son retrait pour l'année prochaine.

Par Urs Heller, rédacteur en chef du guide GaultMillau Suisse 

Changement de génération, relève de la garde: à la pointe de la gastronomie suisse, il y a de l’évolution dans l’air. Horst Petermann et Gérard Rabaey sont «à la retraite» (l’un plus que l’autre). Leurs successeurs, Rico Zandonella (Kunstuben, à Küsnacht ZH) et Stéphane Décotterd (Pont de Brent, à Brent VD) ont pour la première fois été jugés sur leur cuisine personnelle. Notre verdict: elle est éblouissante! Mais la note maximale de 19 ne se transmet pas comme un héritage, et nous avons décidé de leur attribuer 18/20 pour récompenser ces débuts prometteurs.

Le 1er avril 2012, il y aura également une passation de pouvoir à Crissier. Philippe Rochat s’en va (trop tôt à notre humble avis!) et laisse la place au brillant Benoît Violier. Rochat étant encore aux commandes pendant les six prochains mois, nous avons décidé de lui laisser ses 19 points dans la présente édition du guide.

Nous avons également excellemment bien mangé chez les autres détenteurs de la note suprême. Nous aimons le tempérament de Philippe Chevrier (Domaine de Châteauvieux, Satigny GE), l’infini talent de Didier de Courten (Hotel Terminus, Sierre VS) et la performance royale de Bernard et Guy Ravet (L’Ermitage, Vufflens-le-Château VD). En Suisse alémanique, l’infatigable André Jaeger (Fischerzunft, Schaffhouse) fourmille de nouvelles idées. Et Andreas Caminada (Schauenstein, Fürstenau GR) est sans conteste devenu une vraie star de la cuisine suisse; on reste pantois devant son calme souverain face à la pression montante et frustré de devoir attendre près de huit mois pour obtenir une table dans son restaurant. L’entrée au club restreint des 19/20 n’est pas interdite pour autant. Il existe même une liste d’attente. Mais nous préférons éviter toute précipitation, car ce saut mérite d’être mûrement réfléchi. 

Le «Cuisinier de l’année» dans une auberge de campagne

Rappelons-nous les derniers «Cuisiniers de l’année». L’un d’entre eux cuisine dans un château (Andreas Caminada), deux autres sont installés dans le confort d’un hôtel 5-étoiles (Peter Knogl, Les Trois Rois, à Bâle, et Dominique Gauthier au Beau Rivage, à Genève). C’est à se demander s’il faut du bling-bling, des mécènes et des sponsors pour garantir l’excellence. En fait, plusieurs chemins mènent à ce résultat. Sans chercher à nous distancer d’un mécène prêt à investir dans un restaurant d’exception, nous sommes toujours prêts à donner aussi sa chance à un patron compétent qui paie lui-même ses factures à la fin du mois. Et nous nous trouvons aussi bien dans une belle auberge de campagne que dans un palace.

A l’Adelboden, à Steinen (SZ), Franz Wiget dirige une des plus belles auberges de Suisse. Son très sympathique, mais pas très luxueux restaurant se trouve posé au centre même de Schwyz-Sattel. Le chef a trouvé le parfait équilibre ces dernières années: il cuisine avec les produits de la région que ses amis et voisins lui fournissent (viande de la Muotatal, poisson du lac de Zoug, fromage des alpages proches). Il ne dédaigne pas pour autant les produits de la mer et complète son offre en se procurant de magnifiques poissons et crustacés qu’il apprête avec brio. Wiget est aux fourneaux et dirige sa petite brigade avec doigté. Son épouse Ruth contribue au bien-être des hôtes dans la confortable salle à manger en veillant à leur procurer une ambiance douillette et un service très professionnel. Une adresse sympa­thique et de qualité. Franz Wiget sera le premier «Cuisinier de l’année» de Suisse centrale! 

Une «Cuisinière de l’année» et trois «Promus de l’année»

Le titre de «Cuisinière de l’année » est rarement attribué. En effet, peu de femmes relèvent le défi de lutter des années durant pour se faire une place dans les sommets de l’art culinaire. Des précédentes «Cuisinières de l’année», seules trois sont encore aux fourneaux: Vreni Giger (2003, Jägerhof, à Saint-Gall), Tanja Grandits (2006, aujourd’hui Stucki, à Bâle) et Käthi Fässler (2009, Hof Weissbad, Weissbad AI). Voici donc du renfort en la personne de Maryline Nozahic, 37, (La Table de Mary, Cheseaux-Noréaz VD), qui grimpe à 16 points et obtient donc ce titre. Cette française, venue du département de l’Ain, n’est cependant pas tout à fait inconnue de notre guide, puisqu’en 2005, elle était notre «Découverte de l’année».

GaultMillau met également sous les feux de la rampe trois autres restaurants: les «Promus de l’année». En Suisse alémanique, nous sommes doublement chanceux: les frères Horst et Daniel Homann à Samnaun-Ravaisch (GR) ont cuisiné pour nous durant de longues heures et nous ont tant éblouis que nous leur avons attribué la note 18. A Berne, au Meridiano, Markus Arnold, un jeune chef de 28 ans, nous a frappés par son incroyable talent et son ambition. Nous le mettons en lumière en lui attribuant 17 points. En Suisse romande, Damien Germanier de «La Botza» à Vétroz nous a également enthousiasmés (16 points). Formé auprès des plus grands, il a désormais pris son envol.Enfin, citons nos «Découvertes de l’année»: Tino Zimmermann (14, Stiva Veglia, à Schnaus GR), Julien Retler (14, Le Petit Manoir, à Morges VD) et Matthias Althof (15, Tenta­zioni, à Cavigliano TI). 

Deux hôtels d’exception en mains suisses: le Lausanne-Palace & Spa et le Dorchester

Le GaultMillau est aussi un guide hôtelier. En 2011, nous récompensons le Lausanne-Palace & Spa, dirigé par un hôtelier d’exception, Jean-Jacques Gauer. Il est secondé par une véritable star de la cuisine, Edgard Bovier, chef de la restauration.

L’excellence suisse s’exporte également à Londres où le Fribourgeois Roland Fasel, General Manager au Dorchester, conserve à cette vénérable institution panache et fraîcheur en s’adjoignant de grands noms de la cuisine tels qu’Alain Ducasse, Sir David Tang ou Wolfgang Puck. Il mérite donc son titre de «Star suisse de l’étranger».Le «Sommelier de l’année» se déniche au Noirmont (JU). Thomas Schmidt, issu d’une famille de vignerons alsaciens, jouit de la confiance totale de son patron Georges Wenger et des clients de cet établissement renommé. Ulf Brauner (Hess by Braunerts, à Engelberg, 15 points) offre non seulement la table, mais aussi un magnifique smokers’ lounge. Il est notre «CigarMan of the Year». 

Au moins 696 des 837 restaurants répertoriés ne sont pas des adresses de luxe

Le GaultMillau 2012 atteint le nombre record de 837 restaurants (et plus de 100 hôtels). Un guide du luxe? Certes non, puisque 696 des 837 adresses contenues dans le guide ne sont pas des «temples de la restauration», mais bien des adresses où des cuisiniers officient dans des quartiers de ville excentrés, des villages ou en pleine campagne. Ces cuisiniers engagés et passionnés ne font pas de chichis ni jonglent avec les cloches en argent. Ils déteignent d’ailleurs de plus en plus sur les restaurants de luxe où l’ambiance se fait plus détendue au fil des ans. 

81 restaurants gagnent un ou plusieurs points, 29 perdent un point, 84 adresses sont nouvelles et 80 sortent du guide.  

Ce communiqué et les illustrations se trouvent sur www.schweizer-illustrierte.ch/essen+trinken 

GaultMillau Suisse